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Retour sur le Gilded Age : monde des affaires et classe politique à la fin du XIXe siècle

L’expression « Gilded Age » est revenue en force ces dernières années : les scandales financiers qui ont accompagné les années 2000, les pratiques rapaces de certains hommes d’affaires, les opérations de fusion-acquisition géantes, ont fait resurgir la mémoire des États-Unis de la fin du XIXe siècle. Ce premier « Gilded Age »(« Âge du Toc »), selon l’expression forgée par le génie satiriste de Mark Twain et son coauteur Charles Dudley Warner, véhicule toujours une image de vénalité, de relations incestueuses entre politique et affaires, de manipulations anti-démocratiques par toute une classe ploutocratique – qui trouve une résonnance dans les controverses d’aujourd’hui.

Cette vision de la fin du XIXe siècle a toutefois été sérieusement révisée par les historiens, qui ont mis en garde contre l’exagération du pouvoir et de la cohérence des milieux d’affaires, ou critiqué l’idée de la « capture » des institutions politiques par les grandes entreprises. Pourtant cette expression de « Gilded Age » interroge toujours notre compréhension des liens entre démocratie et capitalisme, et finalement du type de société qui surgit aux États-Unis dans cette période.

Depuis un demi-siècle, l’historiographie a exploré des aspects très divers de la société américaine de la guerre de Sécession au tournant du siècle. Dans des travaux de synthèse récents, plusieurs historiens ont tenté de reformuler les interprétations générales de la période, et de restituer la rapidité et la profondeur des transformations que connaît alors le pays. Mais qu’ils insistent sur l’essor d’une société de consommation, sur les bouleversements engendrés par l’industrialisation effrénée, ou sur la mutation de l’idéologie libérale, ces travaux éludent la plupart du temps la question qui était au cœur de la critique résumée par l’expression « Gilded Age » : celle des rapports entre hommes d’affaires et classe politique. Alors que des débats émergent pour savoir si « Gilded Age » est une appellation appropriée pour cette période, il est temps d’affronter, à la lumière de la nouvelle historiographie et de nouvelles recherches, la question au cœur même du terme.

La journée d’études que nous proposons a donc pour but de s’interroger à nouveaux frais sur les liens entre deux milieux en mutation profonde : le monde des affaires et le monde politique, des années 1860 aux années 1890. Plusieurs pistes peuvent être explorées :

  • Dans quelle mesure les réseaux d’affaires et politiques se recoupent-ils et partagent-ils des intérêts communs ? Comment comprendre les multiples scandales de corruption de la période ? Doit-on y voir un signe du pouvoir accru de l’État en matière économique ou la marque de profonds désaccords sur la manière de gérer les entreprises ? Ces scandales sont-ils liés à l’émergence de nouvelles formes de lobbying ?

  • Les institutions politiques se font-elles dépasser par les transformations économiques du pays ? Le système des partis jacksonien est-il devenu obsolète ? La persistance des alliances d’intérêts locaux, le poids des identités régionales, peuvent-ils servir d’ancrage démocratique dans ce nouveau contexte ? À quelles échelles se jouent les relations entre hommes d’affaires et hommes politiques ?

  • L’historiographie du libéralisme américain, qui définit cette notion comme idéologie autochtone et dominante, a identifié une mutation du libéralisme dans cette période. Quel est le rôle des hommes d’affaires et de leurs alliés journalistes ou lobbyistes dans ces redéfinitions ? Jouent-ils alors contre des hommes politiques, et ces derniers sont-ils entièrement voués à la perpétuation de leur parti, comme on le suppose habituellement ?

Ce ne sont ici que quelques pistes possibles, et nous sommes intéressés par toute proposition de communication qui cherche à réexplorer les liens entre monde politique et milieux d’affaires dans cette période cruciale de l’histoire américaine. Nous encourageons également toute proposition portant sur les aspects transnationaux de cette thématique, ou permettant, par l’étude de la même problématique dans un autre pays, de jeter un éclairage nouveau sur la situation américaine.

Les propositions (2000-3500 signes) sont à faire parvenir avant le 14 janvier 2011 inclus, à cfp.gilded.age@gmail.com. La journée d’études, co-organisée par l’université Sorbonne Nouvelle (EA CREW/OPA) et le CENA (EHESS-CNRS), est prévue à Paris pour le 29 avril 2011.

Nicolas Barreyre (université Paris Ouest Nanterre / CENA-MASCIPO)

Évelyne Payen-Variéras (université Sorbonne Nouvelle - Paris 3 / CREW-OPA)

Naomi Wulf (université Sorbonne Nouvelle - Paris 3 / CREW-OPA)

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